Jeanne Cherhal

Venir à Nantes, même si c’est régulier, est-ce que c’est un retour ?
Clairement. C’est la ville où j’ai débuté. J’ai fait mes premiers pas le midi dans la cafet’ du TU, j’ai joué au TNT. Nantes, c’est mon berceau, j’y suis née. C’est retour à l’envoyeur !
 
Retour à la Salle Paul Fort…
J’adore cette salle, sa configuration, le rapport salle-scène. Elle est idéale pour cette tournée solo. J’y ai beaucoup joué et j’ai hâte de la retrouver.
 
Et aussi un retour au piano…
J’ai commencé par ça. Mais depuis quinze ans, j’ai toujours tourné avec des musiciens. J’ai senti le besoin de repartir en solo. Une envie instinctive et spontanée de repartir avec mon bagage. Parce ce que mon jeu de piano a changé. Je n’ai plus la même sensibilité musicale, plus les mêmes envies. J’ai muri. J’ai toujours autant de plaisir à me retrouver seule face à un public mais je n’ai jamais eu autant le trac que sur cette tournée.
 
Vous avez une culture de la chanson, Véronique Sanson, est-ce celle dont vous êtes la plus proche ?
Elle est celle qui m’émeut le plus, qui parle à ma fibre profonde de musicienne. J’adore la compositrice, la façon dont elle aborde la féminité, ses failles, l’amour. Elle livre tellement ses sentiments, et de manière généreuse, spontanée. C’est toujours très beau. Et niveau pianistique, un maître.
 
Quels sont les autres membres de votre famille ?
En premier, Vincent Delerm. Nous sommes très proches, frère et sœur de lait. Nous avons beaucoup tourné ensemble, et de la tendresse l’un envers l’autre même si dans la forme, il n’y a pas grand chose à voir. Philippe Katerine, je le considère aussi comme un grand cousin. Je suis admirative de tout son travail. Puis Jacques Higelin qui est un peu mon parrain. Ce soir, je vais fêter ses 76 ans, il est très proche de moi. Et les Françoises.
 
Que deviennent les Françoises ?
En tant que groupe, pas grand chose. Nous n’avons en réalité fait qu’un concert à Bourges. Nous sommes de la même génération. Il y a un lien, un fil invisible entre nous. Je pense souvent à elles et je suis contente de les avoir réunies sur mon disque.
 
À l’heure des primaires, allez-vous devoir ressortir Si tu reviens j’annule tout ?
Pffff, j’aimerais tellement qu’on plane un peu au dessus de ça.
 
On connaît vos engagements, quelles sont les causes les plus urgentes à défendre ?
Il y en a tellement que je vais dire la place de la culture dans la société. Dominique A monte une opération pour les publics les plus défavorisés. Ça m’a beaucoup touchée : je pense que je vais le rejoindre. À tous les niveaux, si on fait entrer la culture dans toutes les branches et les couches, on aide les esprits à s’élever. C’est bien sûr une façon de lutter contre le radicalisme. Le combat le plus urgent, il est dans l’éducation et la culture.
 
De là où vous êtes, comment voyez-vous le présent, votre parcours et votre avenir ?
Je suis totalement ancrée dans mon présent. Je fais exactement ce que j’ai envie de faire au moment où je le veux, c’est une bénédiction. Je suis musicalement super épanouie. Tant que je suis en tournée, j’ai du mal à me projeter. Regarder en arrière, je ne saurais pas quoi en dire. Jamais je ne me suis forcée. Travailler en liberté, c’est le plus précieux. J’ai quand même de la chance !

propos recueiillis par Patrick Thibault